Ce livre part d'un constat sur l'état du monde : le repli sur soi de tout un chacun va de pair avec une cacophonie des idées, une frivolité des comportements. À cette banalité de base, il ajoute un second bilan critique : le capitalisme actuel se nourrit de nos postures subversives, carriéristes ou ludiques. Il trouve sa ressource non dans notre force de travail, mais dans le coeur même de notre imaginaire. Il recycle en boucle nos fictions vécues, soit sur écran, soit en réseau, nos potentialités psychique et sociale. Tout se passe comme si le vieux slogan - "L'imagination au pouvoir !" - avait pris force de réalité à nos dépens, sous la forme douce-amère d'un totalitarisme manipulateur. D'où la proposition séditieuse d'Éric Arlix : créer une sorte de sujet intermédiaire, le Jou, redistribuant autrement les puissances aliénées du Je et du Nous, navigant entre un Je livré aux ambivalences du désir et un Nous vidé de tout idéalisme collectif. Mêlant les apparences d'un traité de philosophie, d'une méthode de "développement personnel", d'un manifeste néo-dadaïste, d'une mélopée énumérative de poésie sonore, d'un samizdat d'activisme underground et d'un roman d'anticipation rétro-futuriste, Éric Arlix joue de ce mixage des genres sans confusionnisme, ni effet de mode tape-à-l'oeil.