Sous une forme très vivante (dialogues, personnages mis en scène), Isabelle Stengers se penche sur les rapports entre Newton et Leibniz. Leur échange de correspondance pose problème. Pourquoi Newton, alors au sommet de sa gloire scientifique et de son pouvoir en Angleterre, accepte-t-il qu’un théologien, développant des thèses bien étranges pour un homme de science, écrive en son nom ? Quel secret cache-t-il ? Et pourquoi, lorsque Leibniz aura découvert ce secret (Newton a été et est peut-être toujours un alchimiste), décide-t-il de ne pas s’en servir et de garder le silence ? Son choix, préserver la possibilité de relations pacifiées entre leurs héritiers, fut-il le bon ? Et en quoi ce passé dépassé peut-il bien nous importer ?

A travers ce récit mi-imaginé, mi-réel, qui se déroule comme un film sous les yeux du lecteur, l’auteur nous invite à réfléchir sur la manière dont les sciences s’inventent, diffusent leurs travaux, s’imposent dans l’opinion, se fabriquent des ennemis à disqualifier au nom de la raison. Mais d’autres possibilités existent où faire de la science n’implique pas une attitude guerrière.

Ni science fiction, ni essai historique, cet ouvrage, où l’histoire est respectée (elle constitue le matériau de l’intrigue) mais aussi fabulée, est ce que l’auteur appelle une « scientifiction ».